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UNE PAROISSE MODERNE

qui le Canada tout entier doit son existence, et cela depuis trois cents ans !

Les hommes d’aujourd’hui, qui n’ont pas dépassé la cinquantaine, se rappellent encore le temps où les vivres étaient tellement chers à Saint-Jérôme, par suite du manque de communications, que les pauvres familles des nouveaux colons étaient obligées, pour ne pas mourir de faim, de faire ce qu’elles appelaient leur soupe, avec des herbes et des feuilles, infusion qui était leur seule nourriture. Comme il n’y avait encore de chemin d’aucun côté, les gens s’attelaient eux-mêmes sur une charette et portaient sur leur dos un sac de cendre chez le marchand le plus voisin, et celui-ci donnait en retour quelques misérables livres de farine, d’une qualité moins qu’inférieure.

En ce temps-là tout le monde, toutes les puissances s’étaient déclarées et s’étaient liguées contre le colon : le gouvernement d’abord, puis les compagnies de spéculateurs ou les particuliers privilégiés qui accaparaient et détenaient