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LE CURÉ LABELLE

pour cela sans hésiter, son beau et grand jardin, fruit de quinze années de soins diligents, et il avait donné lui-même tout le terrain nécessaire et fait ouvrir, en arrière de son presbytère, une large rue, qui serait devenue à proprement parler la rue de l’église.


Il y avait déjà deux ans que le bon et généreux curé se préparait pour cet événement. Il n’attendait plus que la création de l’évêché du Nord, sa dernière pensée, son dernier projet, le sceau suprême qu’il voulait mettre à sa vie d’apostolat et de combats pour son peuple de colons. Il n’eût pas tardé à faire sortir de terre les centaines de mille dollars nécessaires à l’érection de son temple, il eût trouvé partout un écho à son appel… soudain tout s’écroule. Un mot arrive de Rome qui brise le rêve et l’âme de l’apôtre, et lui-même, qui sent qu’il n’a plus qu’à mourir, reçoit avec grâce la mort qui vient à son appel muet et qui se hâte, afin de lui épargner le regret trop cruel de laisser sans la revoir encore une fois, sa pauvre vieille mère, sa « maman, » comme il a dit jusqu’à la fin, nom unique dans toutes les langues, le premier que