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L’OUTAOUAIS SUPÉRIEUR

quelques plis d’arbres rabougris, descendant tristement sur leurs flancs jusqu’à la bordure de rochers granitiques qui n’abandonne pas un instant la rivière. Le village, ou si l’on veut, la ville elle-même est assise sur un lit d’énormes cailloux, qu’il a fallu soulever et reculer à grand’peine pour donner passage aux chemins et aux rues. Ces cailloux, isolés, en nombre infini, ont été laissés là, sur place, par le retrait des glaciers qui couvraient, lors de l’époque glaciaire, le lit de la rivière beaucoup plus large alors qu’aujourd’hui. Il faudrait faire un travail prodigieux et dépenser des sommes énormes pour en débarrasser cet endroit dont les perspectives d’avenir ne permettent pas de récompenser un si colossal labeur, surtout si l’on met à exécution le chemin de fer projeté entre North Bay, sur le lac Nipissingue, et le Témiscamingue. Ce chemin de fer, en effet, enlèverait à la ville de Mattawa tout le commerce de bois de la région du Témiscamingue et du lac Kippewa, dont elle dépend aujourd’hui pour sa subsistance.

En face de Mattawa, de l’autre côté de la rivière, se dresse une montagne chenue, aux trois quarts pelée, semblable au dos d’un chien galeux, qui laisse pousser entre les intervalles de ses rochers cagneux quelques rares sapins et bouleaux qui ont l’air d’être retenus là plutôt que d’y croître, et sur l’un de ses