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Un autre aussi m’écrit de Lyn (Ontario)

« Envoyez-moi, je vous prie, votre Lanterne pour six mois.

Dites la vérité, dût le ciel tomber sur votre tête : »

Soyez tranquille, je la dirai, la vérité.

Ce sont deux protestants qui m’ont écrit ces deux lettres. Ce n’est pas là le pire ; ce qui est horrible, c’est que je ne m’en cache pas. Oui, mes amis, de l’argent de protestants, monnayé et frappé par Belzébuth, qui va servir à payer mon cordonnier, lequel le prendra sans demander d’où il vient.

C’est un signe des temps.

Un autre correspondant m’écrit de Québec, sous la signature « Historicus. »

Je regrette d’avoir à refuser son article.

Qu’il soit bien entendu, et je désire bannir toute équivoque à ce sujet, que ma Lanterne ne peut servir à aucun genre de personnalités.

J’écris pour instruire, non pour satisfaire des haines. Qu’importent le nom ou les actes de tel ou tel. Tant que ces actes n’ont pas un caractère public et ne peuvent servir d’exemple, je n’ai rien à y voir.

Je veux maintenir ma Lanterne à la hauteur d’un pamphlet, et non l’abaisser au libelle.

Ça ne serait vraiment pas la peine de prendre une plume pour me mettre au niveau de ces petits insulteurs gagés qui mendient l’aumône du scandale et vivent des réputations que leur souffle flétrit.

Je descendrai dans l’arène pour y combattre le vice, le mensonge, l’hypocrisie, toutes les hontes, jamais pour outrager un nom.

Non que ce soit là le rôle que veuille me faire jouer le correspondant « Historicus ; » mais j’y arriverais bientôt et n’aurais plus raison de m’arrêter, ayant entamé la pomme.

On comprendra sans doute maintenant que je ne puis sortir du terrain où je me suis placé, et que, voulant rendre ma Lanterne utile, je ne puis la faire méprisable.

Bon nombre de personnes me demandent encore tous les jours « Où donc trouve-t-on votre Lanterne ? »

Je déclare que je suis exaspéré.

Où trouve-t-on la Lanterne ! Mais partout. Partout les affiches brillent et vous invitent.

Si vous voulez l’avoir, vous n’avez qu’à ouvrir les yeux. Si vous ne la voulez pas, ne venez pas m’en parler.