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LA VALLÉE

une portion différente de ce pays. Réunis de nouveau à leur point de départ, après quelques jours d’exploration, ils reprennent la route de la mission, emportant avec eux une petite quantité du sol canadien pour le faire voir à leurs compatriotes de Rustico. Ils avaient trouvé la contrée « de leur fantaisie », suivant leur expression. Ils donnent quelques explications au missionnaire, lui assurent qu’il verra arriver avant longtemps de nouveaux colons, et, après quelques heures de repos, mettent de nouveau à la voile et retournent à l’Île du Prince-Édouard, où ils ont hâte d’arriver, pour donner toutes les bonnes nouvelles dont ils ont l’esprit et le cœur remplis.

Les explorateurs arrivent à Rustico sans accident. Grande nouvelle dans la paroisse. Tous s’empressent de venir rencontrer les voyageurs, de les faire parler et de se faire montrer la terre du pays lointain. Le curé se met aussitôt à l’œuvre et pousse vigoureusement à l’émigration. Mais il rencontre une forte opposition au début. Les uns disent qu’on veut envoyer leurs parents, leurs enfants et leurs amis mourir de faim au milieu des bois du Canada. D’autres regardent la chose comme impossible. Malgré toutes les résistances, néanmoins, la persévérance du curé réussit à gagner quelques familles. De leur côté, les explorateurs font un tableau séduisant de leur voyage, de la richesse du sol et des forêts qu’ils avaient visitées. Enfin, un mouvement se détermine, et, dès le mois d’octobre suivant, quatre familles et trois jeunes gens, décidés à tenter l’aventure, s’embarquent dans une goëlette, à Rustico, afin de se rendre à la Matapédia, d’y hiverner et d’y commencer tout de suite les travaux de défrichement.

Au Nouveau-Brunswick, ils prennent passage sur un