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habitants des nouveaux établissements offrent partout l’exemple du progrès et de l’activité. À peine ont-ils satisfait aux besoins les plus impérieux que vous les voyez de suite témoigner de l’intérêt pour l’éducation, s’occuper de leurs affaires municipales et, au besoin, raisonner fort sainement sur les affaires politiques. Il y a certaines plantes qui, pour atteindre tout le développement dont elles sont susceptibles, ont besoin d’être arrachées du sol dans lequel elles ont germé et d’être transplantées ailleurs ; on dirait que la conquête du sol vierge a le même effet sur la classe des défricheurs. »

En quittant Hébertville, on s’éloigne petit à petit de la Belle Rivière qu’on laisse à sa droite et l’on continue de suivre le chemin Kenogami jusqu’à Saint-Jérôme, première paroisse établie sur le bord du lac Saint-Jean, à douze ou treize milles du village que nous venons de laisser derrière nous. Le pays est extrêmement accidenté, montueux, pittoresque, d’une originalité brouillonne et tapageuse qui en fait comme une espèce d’enfant terrible de la nature prêt à tout mettre sans dessus dessous. On n’y fait que monter et descendre des côtes pratiquées au milieu d’épais dépôts d’alluvion qui apparaissent comme des collines abruptes se dressant dans toutes les postures le long de la route. On ne voit partout que vallées et coteaux, et la campagne semble onduler sous le regard. À droite, à gauche, devant, derrière soi se découvrent de petits lacs, remplis de truites, qui baignent la base des collines et plongent dans la terre à des profondeurs souvent prodigieuses ; ces petits lacs donnent naissance à une foule de cours d’eau qui fuient dans toutes les directions et se creu-