Page:Buies - Le Saguenay et la vallée du lac St-Jean, 1880.djvu/260

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 239 —

remplis de brochets, de nombreux chenaux qui sont autant de membres de la Mistassini, et au milieu desquels il est souvent difficile de se retrouver et de diriger sa course : le gibier aussi y foisonne, les canards et les outardes, en troupes serrées, venant s’abattre pour y banqueter ensemble, parmi les hautes herbes grasses qui s’étalent comme une bordure le long des chenaux[1]. Sur les rivages de la terre ferme on voit se dresser de gracieuses forêts de trembles et de frênes, et de temps à autre, quelques groupes de grands ormes, vigoureux et touffus, étendront leurs puissantes branches sur la rivière comme pour lui verser la fraîcheur de leur ombrage. Quelques log houses, dernières habitations du Lac, se montreront aussi à demi ensevelies dans les bois le long de la rivière Ticouapee, au milieu des souches encore fumantes et des innombrables racines d’arbres, à peine déchaussées, qui s’entrelacent sous les pas.

C’est là la région fertile par excellence du pays que nous parcourons ; aussi est-elle destinée à voir la colonisation s’y porter rapidement, pour peu qu’elle suive l’impulsion qui lui a été donnée par l’établissement du township Normandin et par la prochaine distribution des lots du township Albanel qui l’avoisine.

  1. Au printemps, les outardes vont loin dans le nord, parce qu’elles n’ont pas de quoi manger sur les terrains que le Lac recouvre. Elles vont vers la hauteur des terres, où elles font leur couvée. Quand vient septembre, elles redescendent, se réunissent au Lac d’où elles repartent par groupes, chaque groupe volant vers son endroit de prédilection, qui est Kamouraska, l’Île Verte, Saint-Joachim ou Sorel.

    Les outardes sont des oiseaux de passage qui, après avoir séjourné quelque peu dans tous ces endroits, se dirigent vers le sud.