Page:Buies - Le Saguenay et le bassin du Lac St-Jean, 1896.djvu/80

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« 11. À la fonte des neiges, quand il marche sur des lacs ou de longues rivières, il est tellement ébloui pendant quatre à cinq jours par l’eau continuelle qui lui tombe des yeux qu’il ne peut lire son bréviaire ; quelquefois il faut le mener par la main. Cela est arrivé au P. Silvy et au Père Dalmas et à moi qui, en chemin, ne voyais que le bout de mes raquettes.

« 12. Il est souvent importuné de petits enfants, de leurs cris, de leurs pleurs, etc., et quelquefois il est incommodé de la puanteur de ceux et de celles qui ont les écrouelles, avec qui même il boit d’une même chaudière. J’ai passé plus de huit jours dans la cabane de Kaouïtaskouat, mystassin le plus considérable, et couché auprès de son fils incommodé, dont la puanteur m’a souvent fait soulever le cœur de jour et de nuit ; j’ai bu et mangé aussi dans son ouragan.

« 13. Il est quelquefois réduit à ne boire que de l’eau de neige fondue, qui sent la fumée et elle est très sale. L’espace de trois semaines je n’en ai pas bu d’autre, étant avec des étrangers, dans les terres de Peokouagamy (lac Saint-Jean) ; je n’ai pas vu de sauvages plus sales à manger, à boire et à coucher que ceux-là. Souvent la viande était pleine de poil d’orignal ou de sable. Une vieille prenait à pleine main, avec des ongles très longs, la graisse dans la chaudière, y ayant jeté de la neige : et puis elle nous la présentait à manger dans un ouragan très sale ; et chacun buvait du bouillon de la même chaudière.

« 14. En été, dans les voyages sur terre dans le Saguenay et sur le grand fleuve, il boit assez souvent de l’eau bien sale, qu’on trouve dans quelques mares. Depuis trois jours que le vent nous arrête, nous n’en buvons pas d’autre. Quelquefois le vent l’oblige à se sauver dans les lieux où on n’en trouve pas du tout. Cela m’est arrivé plus d’une et trois fois ; j’ai même été souvent obligé de boire dans des mares où je voyais des crapauds, etc.