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Rimouski n’est pas seulement une campagne, c’est une petite ville, et une petite ville qui mérite admirablement ce nom. Figurez-vous que vous êtes sur le bord du fleuve, mais absolument sur le bord, là où sa largeur atteint une douzaine de lieues et d’où le regard aperçoit vaguement la rive nord confondue avec l’horizon, ou baignée dans les flots qu’elle teint d’une longue frange bleue qui semble flotter, se soulever ou s’abattre comme une crinière ondulée. Vous êtes au fond d’une baie de peu de profondeur, qui s’évase largement, et que deux pointes de terre inégales protègent de chaque côté contre la violence des vents du nord-est ou du sud-ouest ; le chemin, un chemin plus beau, plus régulier que les chemins macadamisés les mieux entretenus, passe presque sur la grève, entre deux haies de maisons qui se suivent dru sur une longueur de vingt arpens et qui constituent le cœur même de la ville ; derrière, un côteau dominé par de grands édifices tels que le palais de justice, le collège et le couvent, et recouvert çà et là de villas élégantes que des jardins naissants et d’ingénieuses plantations dérobent plus ou moins au regard. À l’extrémité de gauche, une rivière extrêmement pittoresque, variant de deux à cinq cents pieds en largeur, se fraye sournoisement un chemin dans l’intérieur du pays et va se perdre près de la frontière avec ses truites, ses saumons et ses anguilles qui ont escaladé cascades, écluses et barrages. À l’extrémité de droite, c’est la pointe apparente que fait la baie en se refermant, et qui n’offre aucun relief, mais dont le contour régulier, au