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récits de voyages

main, manifeste, saisissante, il a fallu combattre avant tout, quoi ? nos propres préjugés, des préjugés qu’une ignorance absolue de ce pays rendait intraitables, et dont le plus redoutable consistait à croire que la chaîne des Laurentides était absolument inaccessible.

Deux ans même après le commencement des travaux sur la ligne, j’avais entendu l’un des hommes les mieux renseignés de la province me formuler cette croyance comme une vérité, indiscutable, et cela en présence du fait même que le chemin de fer du lac Saint-Jean avait déjà traversé ces mêmes Laurentides et en était arrivé presqu’à la moitié de son parcours ! Quoi ! la chaîne des Laurentides inaccessible à une voie ferrée ! Mais qu’est-ce donc que cette chaîne, comparativement à la Sierra Nevada, que traverse l’Union Pacific, ou aux montagnes Rocheuses, que traverse le Pacifique canadien, ou même aux chaînons pourtant peu élevés, comparativement à tant d’autres, des cantons de l’Est, où les chemins de fer, qui conduisent au Maine, gravissent jusqu’à une altitude de deux mille pieds, tandis que le plus haut point atteint par la ligne du lac Saint-Jean n’est que de 1300 pieds au-dessus du niveau de la