sur le point culminant du cap, à l’extrémité est de la Citadelle. C’est le terme de notre promenade, si longue à décrire et si courte à parcourir. Mais avant d’escalader le glacis, arrêtons-nous pour contempler le monument de Wolfe et de Montcalm qui, derrière la batterie masquée du jardin du gouverneur, au pied même de l’escarpement que couronne le bastion du roi, semble une sentinelle adossée au cap et plongeant au loin son regard sur le fleuve. Voilà bientôt soixante-dix ans que cette sentinelle de pierre regarde, à travers les orages et les brouillards du Saint-Laurent, à travers les nuits épaisses et les sifflements aigus du nord-est, dont la voix couvrirait celle des canons, s’il ne vient pas quelque nouvel envahisseur, avide de nous démolir à son tour pour nous posséder ensuite. Mais son œil se fatigue en vain à sonder les perfides détours du Saint-Laurent, les sombres hauteurs de Lévis et ses rivages, muets : Nous n’avons plus un ennemi dans le monde entier, et les ombres réunies de Montcalm et de Wolfe, sous la pierre de leur monument, peuvent s’embrasser en paix dans un éternel repos. Ce ne sont pas du reste nos remparts ni les foudres qui les surmontent que l’ennemi aurait à craindre aujourd’hui, et je crois qu’ils lui feraient moins de mal qu’à nous-
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