Page:Buies - Réminiscences, Les jeunes barbares, c1893.djvu/102

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
104
LES JEUNES BARBARES

filiale, qu’ils ne s’imaginent pas avoir acquis libre carrière pour commettre leurs vandalismes, et que nous les traiterons à l’égal des barbares qui envahissent les pays civilisés. C’est déjà bien assez que tout ce qui faisait l’orgueil et la distinction des Canadiens d’autrefois, savoir-vivre, urbanité, courtoisie, bonnes manières, ait sombré sous un déluge de façons prétentieuses et triviales, conservons au moins la langue, aussi intacte, aussi inviolée que possible ; défendons-la pas à pas, nous qui sommes ses gardiens, et sauvons-la de l’invasion de tous les insectes destructeurs.



Vous avez du temps devant vous, jeunes Visigoths ! Eh bien ! profitez-en pour ne pas écrire, ou du moins pour apprendre à écrire. Vous ne savez pas tout ce qui vous manque et tout ce que vous avez à apprendre. Quand bien même vous n’apprendriez qu’à douter suffisamment de vous-mêmes pour ne pas tomber dans les plus abominables excès, ce serait déjà quelque chose. Mais, tels que vous êtes, avec vos prétentions monstrueuses, édifiées sur des grains de sable, vous ne pourrez jamais commettre que des horreurs. Fussiez-vous d’incomparables génies, il vous manque encore l’étude, les connaissances, la pratique assidue, les leçons, la direction. On naît écrivain sans doute, de même qu’on naît artiste ou poëte, mais personne