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RÉMINISCENCES

l’indépendance de caractère, que d’épais et obscurs bataillons battaient en brèche à toute heure, et qui, tous les jours, réparant ses blessures, montrait au milieu des tempêtes son front cicatrisé et rayonnant. Mais la guerre odieuse et féroce que l’on faisait à l’Institut ne pouvait durer indéfiniment. Néanmoins il a fallu dix ans pour l’abattre et près de cinq ans de plus pour faire disparaître jusqu’à son nom. L’Institut était venu avant le terme : c’était un enfant robuste et constitué pour affronter tous les temps mais qui avait eu le tort de naître avant celui où il eût pu trouver les éléments nécessaires de viabilité.



La génération à laquelle j’ai l’honneur d’appartenir n’a connu l’Institut-Canadien que dans ses dernières années, années de spasmes, de convulsions, d’intermittences, d’alternatives, d’espérance et de découragement, qui se terminèrent enfin par un trépas ignoré et une disparition sans éclat.

La coupe des humiliations et des désenchantements avait été épuisée ; il ne restait plus que l’injustice de l’oubli et le silence fait autour de sa tombe pour compléter la destinée de l’Institut-Canadien.