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Page:Buies - Réminiscences, Les jeunes barbares, c1893.djvu/70

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LES JEUNES BARBARES

thèque publique et où la lecture du Courrier des États-Unis est interdite !




Et comment voulez-vous qu’il en soit autrement dans un pays où l’on étouffe dans le germe toute indépendance de l’esprit, tout essor intellectuel librement tenté ? Nous sommes le peuple le plus arriéré du monde, comparativement à ce que nous devrions être, formés que nous sommes des deux races qui marchent à la tête de la civilisation. Nous donnons ce spectacle unique, parmi les peuples éclairés, d’un peuple qui ne renferme pas de « classe » instruite. Il y a chez nous des « individus » instruits, voilà tout ; et encore ne le sont-ils que relativement au reste des Canadiens. Tout homme qui a réussi, dans notre petite province, à acquérir une valeur réelle et un fonds intellectuel sérieux, ne le doit qu’à ses propres et pénibles efforts, sans aucune aide, voire même en dépit de tout et à travers tous les obstacles entassés sur sa route.

Et l’on prétendra que c’est dans un milieu pareil qu’il peut exister une littérature nationale ! Eh bien ! Cette littérature, non seulement n’existe pas, mais encore est radicalement impossible, et elle ne cessera de l’être que lorsque ceux qui se mêlent d’écrire auront pu se former dès leur jeunesse dans des colléges où du moins on le leur aura appris, en même temps