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LES JEUNES BARBARES

« C’est là le rôle du médecin d’accomplir ce qui peut se faire de plus grand sur la terre (réduire une hernie par exemple) sauver la vie, et quand on devrait le remercier à genoux, on ignore même ce qu’il a fait. »

Souvent, cela s’ignore, mais pas dans ce cas-ci, bon Dieu !

« Vie de dévouements de suite oubliés (on dit tout de suite), de sacrifices toujours méconnus, c’est là notre récolte. »

Mais de quoi vous plaignez-vous donc, sacrebleu, puisque vous reconnaissez vous-même qu’on est quitte envers vous ?

« Avez-vous déjà vu dans un journal certains passages où justice complète soit rendue au médecin ? Jamais. »

Oui, cela se voit, et souvent et beaucoup. Cette fois-ci, par exemple, la justice va déborder, je vous en réponds.

« Au lieu de ça, les Molières roucoulent leur persiflage. »

Ô Molière ! As-tu jamais rêvé que tu ferais souche de roucouleurs ? Des roucouleurs de persiflage, mes amis ! Vous est-il arrivé déjà d’entendre le chant du crocodile ?

Et dire que la plupart de ces jeunes gens, dont le cerveau est infesté par le microbe littéraire, s’ils voulaient sérieusement le combattre, feraient tous soit d’excellents pâtissiers, soit de bons fabricants d’allumettes, soit des chemisiers ou des tailleurs en renom, soit enfin des maçons qui gagneraient honnêtement leurs trois dollars par jour ! Chacun d’eux, j’en suis convaincu, se ferait un métier profitable et deviendrait un chef de famille