Page:Buisson, Rapport fait au nom de la Commission de l’enseignement chargée d’examiner le projet de loi relatif à la suppression de l’enseignement congréganiste - N°1509 - Annexe suite au 11 février 1904 - 1904.pdf/6

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I
Origines du projet de loi.


Le premier soin de votre Commission a été de se rendre bien compte et de l’objet propre et de la portée du projet que vous la chargiez d’étudier.

Tout d’abord est-ce une loi sur les congrégations, est-ce une loi sur l’enseignement ?

Après examen, nous n’avons cru pouvoir l’envisager exclusivement ni sous l’un ni sous l’autre de ces deux aspects. Cette loi a une double origine : elle est en quelque sorte le point d’aboutissement où viennent converger deux séries d’actes politiques qui ont commencé avec la présente législature.

D’une part, la Chambre des Députés a répondu négativement en 1903 à toutes les demandes d’autorisation des congrégations.

Et, tout aussitôt, cette décision fut interprétée par l’opinion publique dans le seul sens qu’elle comportât : un refus en bloc ne pouvait se comprendre que comme la manifestation d’une volonté arrêtée de n’accorder l’existence légale à aucune congrégation. Car il ne s’est trouvé personne pour supposer que la majorité ait eu l’intention d’en supprimer quelques-unes pour favoriser les autres en les débarrassant d’une concurrence ; personne non plus n’a pu prétendre que ce refus correspondît à des démérites spéciaux imputés à celles-ci plutôt qu’à celles-là, le même refus s’appliquant à toutes sans que l’on fit à aucune son procès en particulier.

Il était donc naturel d’en conclure, comme le firent dès le lendemain amis et adversaires, que les motifs de la non-autorisation, étant de nature générale, s’appliqueraient avec la même force, avec plus de force peut-être aux congrégations dites autorisées, c’est-à-dire à celles qui, mieux servies par le hasard des circonstances ou par des complaisances administratives, ont mis un peu plus aisément leurs papiers en règle, ce qui ne serait pas une raison suffisante pour que la République, refusant tout aux unes, accordât tout aux autres.

Le Gouvernement comprit si bien cette conséquence forcée de nos votes de mars et de juin 1903 que, dès le mois d’août, M. le Président du Conseil, au Congrès des Amicales d’instituteurs à Marseille, après avoir rappelé que ce vote venait « d’arracher l’éducation de la jeunesse aux congrégations qui se l’étaient attribuée sans autorisa-