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sciences biologiques, furent en même temps deux précurseurs de la théorie moderne de l’évolution, deux transformistes d’une valeur très inégale d’ailleurs, car les idées de Treviranus sur la descendance des êtres sont beaucoup moins claires et beaucoup moins justes que celles de J.-B. Lamarck.

Mais quelle que soit la façon dont on suppose établie la filiation des organismes, le seul fait d’admettre l’existence nécessaire de cette filiation suffit pour donner aux lois qui régissent les sciences naturelles les mêmes caractères de généralité et de permanence que l’on connaissait depuis longtemps dans les sciences physico-chimiques.

Au lieu d’une succession discontinue et arbitraire de phénomènes dus au caprice de puissances extérieures à la nature observable par les sens, l’histoire de notre globe n’est plus qu’une lente évolution sans cataclysmes, sous l’action de causes dont nous pouvons journellement encore étudier l’activité.

À mesure que le climat et les conditions d’ambiance se modifient, les espèces se transforment graduellement. Les individus aussi varient à chaque instant pendant toute leur existence, et l’homme lui-même n’échappe pas à cette loi. « Le temps, dit Pascal, guérit les douleurs et les querelles parce qu’on change, on n’est plus la même personne. » Dans l’œuf animal ou végétal, les parties de l’embryon apparaissent tour à tour conditionnées les unes par les autres, et les ressorts tendus dans le protoplasme germinal des générations antérieures se déclanchent successivement, grâce à un automatisme coordonné, pour la formation des générations futures.

Il en résulte qu’on ne peut guère parler de Biologie statique qu’à la façon dont les géomètres parlent de la droite, du cercle et des autres figures dont ils étudient les propriétés, c’est-à-dire d’une manière purement abstraite ; car tout est en continuel mouvement dans les êtres animés, et c’est par une généralisation momentanée, par une simple convention que le naturaliste parle de type spécifique, de genre, de famille, etc., alors qu’il ne connaît que des individus et qu’il considère seulement l’animal ou le végétal à un moment donné et dans une ambiance déterminée.

Telle est bien en effet la pensée de Lamarck : « La nature, par la succession des générations et à l’aide de beaucoup de temps et d’une diversité lente, mais constante, dans les circonstances, a pu produire dans les corps vivants de tous les ordres les changements les plus extrêmes et amener peu à peu, à partir des premières