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Page:Bulletin de l’École française d’Extrême-Orient, tome 18, 1918.djvu/283

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hypothèse de M. Pelliot est exacte, le nom Kin-li-p’i-che, qui apparaît dans des notices probablement antérieures à Yi-tsing, et dans lequel kin est sans doute à remplacer par che, représente très exactement Çrībijaya = Çrīvijaya.

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L’identification de Çrīvijaya permet de répondre à la question qui s’est posée au début de cette étude. On sait maintenant à quel royaume attribuer l’inscription malaise de Bangka et la stèle sanskrite de Vieng Sa : c’est au royaume de Palembang.

Mais l’enquête provoquée par ces deux documents épigraphiques a d’autres résultats d’une portée plus grande et d’un intérêt plus général. Elle révèle d’abord le véritable nom du royaume de Palembang qu’on avait essayé de restituer au moyen des noms que lui donnent les textes chinois et arabes, seules sources, pensait-on, où il fut mentionné. Elle permet ainsi de localiser les pays de Çrīvijaya et de Katāha cités dans divers ouvrages sanskrits [1] et dans l’épigraphie des Čolas : l’identification des conquêtes de Rājendracoja I fixe même un point assez important et jusqu’à présent mal éclairci dans l’histoire des relations entre l’Inde et la Malaisie.

Mais surtout, cette enquête met en pleine lumière le rôle joué en Extrême-Orient par ce royaume malais indouisé dont l’influence rayonnait, de Sumatra, sur les deux côtes de la Péninsule. S’il n’a laissé qu’un nombre insignifiant de monuments archéologiques et épigraphiques, c’est apparemment que ses rois étaient plus occupés à surveiller le commerce des Détroits qu’à construire des temples ou à faire graver leurs panégyriques sur la pierre [2]. A ce point de vue le voisinage de Java, toute couverte de vestiges archéologiques, lui a certainement fait du tort aux yeux de l’Histoire. Mais l’inscription de Grahi émanant d’un personnage qui pourrait bien être un des rois de Palembang, et présentant, comme celle de Tāmraliṅga, les plus grandes analogies paléographiques avec les inscriptions de Sumatra et de Java, tendait déjà à prouver que Tchao Jou-koua n’exagérait pas en montrant le San-fo-ts’i suzerain de quinze Etats dont le plus grand nombre se trouvait sur la Péninsule Malaise. L’épigraphie de Rājendracoja I. dont les listes coïncident en partie avec celle de

  1. On notera que le Çrīvijayapura du ms. népalais correspond exactement (sauf l’omission de Çrī) au Fo-che-pou-lo qui se rencontre dans Yi-tsing comme synonvme de Fo-che.
  2. Cf. ce passage du Ling wai tai ta cité par HIRTH et ROCKHILL (Trad. de TCHAO JOU-KOUA, p. 63) : « San-fo-ts’i is in the Southern Sea. It is the most important port of call on the sea-routes of the foreigners, from the countries of Chö-p’o on the East and from the countries of the Ta-che and Kou-lin on the West. They all pass through it on their way to China ».