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Page:Bulletin de la société des historiens du théâtre, année 2, n°5-6.djvu/11

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Ce qui donne plus de valeur à cette parodie, c’en est la partie critique. Par exemple, à la deuxième scène, après une tirade de 22 vers au lieu des 58 que comporte celle de Voltaire, Zaïre réplique à Orosmane Mais seigneur, permettez que je parle à mon tour, Haranguer si longtemps vous fatigue et vous gêne, Et vous avez besoin, je crois, de prendre haleine. Les derniers vers de la scène 5 soulignent la convention qui, pour maintenir l’unité de lieu, empêche arbitrairement les personnages de se rencontrer. Orosmane s’écrie

Mais que vois-je ? En ces lieux ce Français que j’abhorre Sortons, il ne faut pas que je lui parle encore. De même l’imprudence que commet Nérestan en se confiant à Châtillon tout près du séjour d’Orosmane (Zaïre, I, 1) est soulignée dans ces vers (sc. 6)

Taisez-vous donc, de grâce 1

Si vous criez si fort, le Sultan l’entendra Et ce qu’il m’a promis, peut-être il le tiendra. L’auteur n’est pas dupe de la chasteté supposée de Zaïre, élevée dans le sérail.

CHATILLON

Telle est des musulmans la coupable /;csnce De nos jeunes tendrons ils séduisent l’enfance. Et dès les premiers ans, savent former leur cœur A satisfaire en tout leur amoureuse ardeur. Croyez-vous que toujours elle ait été cruelle? M. Lanson s’étonne (Hommes et Livres, p. 287) que certains éléments mélodramatiques comme la croix de ma mère n’aient pas été critiqués par Dominique, Romagnesi et Riccoboni, et il l’explique ainsi C’est que la croix de ma mère n’était pas usée’; elle chassait les accessoires grecs et romains qui opéraient depuis deux mille ans les reconnaissances tragiques tissus, épées, cuirasses, etc. La croix de Zaïre ne valait-elle pas bien la cuirasse de Mérope ?’" !t en eût peut-être jugé autrement à la lecture de notre parodie manuscrite. Dès l’arrivée de Lusignan, la voix du sang parle en Zaïre

.Sans trop savoir pourquoi, ye sens que mon cœur l’aime, et la scène de la reconnaissance donne lieu à la parodie la plus bouffonne. Si mes enfants vivaient s’écrie Lusignan, et Nérestan dit Ses enfants! Autrefois, Seigneur, j’avais un père.