Page:Bulletin et mémoires de la Société archéologique du département d'Ille-et-Vilaine, volume 8.djvu/213

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des annales de l’Armorique pendant le ve siècle ne prépare au tableau que présentent de ce pays les biographes des saints venus de l’Irlande et de l’île de Bretagne dans cette partie du continent : pays sauvage, presque désert, et d’où tout vestige de culture matérielle et morale a entièrement disparu ; pays païen, comme si l’Église des Gaules, et en particulier les successeurs de saint Martin de Tours, avaient négligé d’en faire la conquête !

Ce sont les ravages de l’invasion frisonne qui, des rives du Couesnon à l’extrémité du Finistère, ont fait le désert où les saints de l’île de Bretagne et de l’Irlande apportèrent de nouveau les germes de la foi chrétienne et de la vie civilisée. Le désert et la barbarie dont parlent les hagiographes, sont l’ouvrage des Frisons. Avant les premières années du vie siècle, l’Armorique, moins éprouvée que beaucoup d’autres parties de la Gaule, qu’avait pas encore subi de tels désastres. Les horribles ravages des grandes invasions n’ont commencé pour ce pays qu’au vie siècle. Alors, ce semble, ont disparu Corseult, la capitale des Curiosolites, et aussi la capitale, quel que soit son nom, de la cité des Osismes : ces deux villes ne se sont jamais relevées. Les pirates ont amoncelé bien d’autres ruines : celles des deux évêchés gallo-romains des Osismes et des Curiosolites doivent leur être imputées. Quant aux prêtres de l’émigration bretonne, comme ils n’ont plus rien trouvé debout, ils n’ont rien renversé ; et la solution de continuité qu’on remarque entre leurs traditions et celles de l’Église des Gaules a sa cause principale dans les calamités de l’invasion frisonne. C’est ainsi ou à peu près que le nouvel historien des Francs comprend la situation de l’Armorique au commencement du vie siècle. Nous croyons qu’il s’est trompé sur l’origine du nom de Létavie, sur le rôle qu’il prête aux Lètes-Francs de Rennes, et aussi quand il remet en honneur l’hypothèse qui fait de ces Frisons les exécuteurs des