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moritzbourg

du beurre, des légumes consommés chaque semaine à Agathenbourg, et des sommes données aux pauvres, de toute la dépense. Elle ne conserva guère ces belles habitudes d’économie, mais enfin, elle les eut, et tout au bout de la race nous verrons revivre en quelqu’un, l’artiste bonne ménagère, chez qui l’amour de l’ordre et le mépris de la loi voisinent bizarrement.

Aurore avait beaucoup d’esprit et même d’intelligence, et puis elle était belle, adorablement belle, Cette absurde expression : « un visage pétri par les grâces », on lui trouve un sens exact lorsqu’on regarde, à Dresde, le buste de la radieuse femme. Rien de plus fin et de plus gai, de plus fier et de plus doux que cette figure. Aurore devait être : orgueil, bonté, sourire. Et quand elle riait, disaient ceux qui l’ont connue, ses paupières clignées lui faisaient un regard si malicieux, si tendre que les âmes les plus fermes en restaient troublées.

L’âme d’Auguste II n’était pas très ferme. À peine eût-il vu Aurore, il l’aima follement.

Accompagné de sa sœur, la comtesse de Lewenhaupt, dont toute l’histoire semble se résumer ainsi : elle était laide et désagréable, Mlle de Kœnigsmark arrivait à Dresde en solliciteuse. Elle voulait savoir ce qu’était devenu son frère Philippe, et quelque temps, s’agita beaucoup, et fit grand bruit autour de la disparition d’un être si cher. Puis soudain, comme tout le monde, elle cessa de s’en occuper. À vrai dire, et encore qu’elle tâchât de rattraper l’héritage de Philippe, elle dut croire longtemps que le