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kolpo. Je sais tout ce qu’on a dit sur les mères qui allaitent leurs enfants, monsieur Squills ; mais la pauvre Kitty est si délicate, que je crois qu’une saine et robuste paysanne vaudra beaucoup mieux pour les nerfs du petit et pour ceux de sa mère, à présent et plus tard. Ah ! la chère femme me manquera bien souvent. Quand se lèvera-t-elle, monsieur Squills ?

— Oh ! avant quinze jours.

— Et alors le Néogilos ira à l’école upo kolpo… en compagnie de sa nourrice, et tout ira bien de nouveau, dit mon père avec un air de gaieté sournoise et mystérieuse qui lui était particulier.

— À l’école ! quand il vient de naître !

— On ne saurait commencer trop tôt, reprit mon père d’un ton tranchant ; c’est l’opinion d’Helvétius, et c’est aussi la mienne. »


CHAPITRE III.

Que je fusse un enfant merveilleux, je vous l’accorde ; mais ce n’est pas de moi-même que j’ai appris les circonstances exposées dans mes deux premiers chapitres. La conduite de mon père, à l’occasion de ma naissance, fit une vive impression sur tous ceux qui en furent témoins. M. Squills et Mme Primmins m’ont raconté ces faits assez souvent pour me les rendre aussi familiers qu’ils l’étaient à ces dignes témoins eux-mêmes. Je me représente parfaitement mon père dans sa robe de chambre gris foncé, avec son sourire étrange, moitié sournois, moitié naïf, et le regard singulièrement embarrassant qui partait de ses yeux d’une beauté calme, sérieuse, indolente, alors qu’il citait Helvétius au sujet de la convenance qu’il y avait à m’envoyer à l’école dès l’instant de ma naissance.

Personne ne comprenait bien mon père, sa femme exceptée. Les Abdéritains firent venir Hippocrate pour guérir la folie supposée de Démocrite, « qui, à cette époque, dit sèchement Hippocrate, s’occupait sérieusement de philosophie. » Ces