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trate, qui vivait six cents ans avant la naissance du Christ ! Bonté du ciel, madame ! vous m’avez fait le père d’un anachronisme ! »

Ma mère fondit en larmes. Mais le mal était irrémédiable. J’étais un anachronisme, et anachronisme je devais rester jusqu’à la fin du chapitre.


CHAPITRE IV.

« Sans doute, monsieur, vous commencerez bientôt à faire vous-même l’éducation de votre fils ? demanda M. Squills.

— Monsieur, vous avez sans doute lu Martinus Scriblerus ? répliqua mon père.

— Je ne vous comprends pas, monsieur Caxton.

— Alors vous n’avez pas lu Martinus Scriblerus, monsieur Squills.

— Supposez que je l’aie lu. Que s’ensuivrait-il ?

— Il s’ensuivrait, Squills, que vous sauriez que, bien qu’un savant soit souvent un sot, il n’est jamais un si grand sot, un sot aussi superlatif que lorsqu’il défigure la première page blanche de la vie humaine, en y inscrivant les lieux communs de son pédantisme. Un savant, monsieur, du moins un savant tel que moi, est de tous les hommes le moins propre à instruire de petits enfants. Une mère, monsieur, une mère telle que les fait la nature, simple, aimante, est le vrai guide de son enfant dans la voie de la science.

— Ma foi ! monsieur Caxton, en dépit d’Helvétius que vous citiez le soir de la naissance de l’enfant, je crois que vous avez raison.

— J’en suis sûr, reprit mon père, aussi sûr du moins qu’un pauvre mortel peut l’être de quelque chose. Je dis avec Helvétius que l’éducation de l’enfant doit commencer à l’instant de sa naissance ; mais comment ?… voilà l’embarras. Faut-il l’envoyer tout de suite à l’école ? Assurément il est déjà à l’école de ces deux grands principes, la nature et l’amour. Remarquez que