Page:Bulwer-Lytton - Aventures de Pisistrate Caxton.djvu/280

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


DIXIÈME PARTIE.


CHAPITRE PREMIER.

Les conjectures de mon oncle au sujet de la famille de Francis Vivian me parurent une découverte positive. Il était très-vraisemblable que, se voyant contrarié dans un amour opiniâtre que nul père n’aurait sanctionné, ce jeune homme volontaire s’était irrité et jeté seul au milieu du monde.

Cette explication m’était d’autant plus agréable, qu’elle éclaircissait tout ce qui paraissait moins honorable dans le mystère dont s’environnait Vivian. Je n’aurais pu m’habituer à croire qu’il eût commis quelque action basse et criminelle, encore que je pensasse qu’il avait été coupable par légèreté. Il était naturel que le caractère équivoque de la société au milieu de laquelle il s’était lancé, voyageur sans amis, n’eût pas révolté son esprit plein d’audace et de curiosité et son caractère aventureux ; mais il était naturel aussi que les habitudes résultant d’une naissance distinguée, et cette éducation muette que les Anglais de bonne famille reçoivent ordinairement dès le berceau, eussent préservé son honneur à travers toutes les vicissitudes. L’orgueil, les préjugés, les défauts des gens bien nés, avaient assurément conservé chez lui toute leur force ; pourquoi les qualités meilleures n’auraient-elles pas de même survécu en lui, quoique momentanément étouffées ? Je me sentais reconnaissant envers Dieu de ce que Vivian retournait dans un élément où il pourrait purifier son esprit, et se mettre en état de rentrer dans la sphère à laquelle il appartenait ; je me sentais reconnaissant aussi de ce que nous pourrions nous revoir, et de ce que notre demi-intimité se pourrait changer en bonne et franche amitié.