Page:Bulwer-Lytton - Aventures de Pisistrate Caxton.djvu/314

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

bien, depuis l’enfer jusqu’au ciel, tu étends de voiles d’ombres et de mystères sur les deux asiles que tu as choisis : la tombe et le cœur humain !

Je voyageais donc enveloppé de mon silence et de ma grande redingote. Le soir du second jour, j’arrivai au manoir paternel. Comme la cloche tinta aigrement à mon oreille ! Comme la lumière qui passa derrière la fenêtre parut étrange et sinistre à mon impatience ! Comme je sentis battre mon cœur en scrutant la figure du domestique qui m’ouvrit enfin la porte !

« Tout le monde se porte bien ? m’écriai-je.

— Tout le monde se porte bien, répondit joyeusement le domestique. M. Squills est ici, mais je ne pense pas que ce soit pour un malade. »

En ce moment ma mère accourut sur le seuil, et je me jetai dans ses bras.

« Sisty, Sisty !… mon cher fils !… ruiné peut-être, et par ma faute… à moi.

— À vous !… Venez dans cette chambre pour qu’on ne nous entende pas… Par votre faute !

— Oui, oui !… car si je n’avais pas eu de frère, ou si je ne m’étais pas laissé entraîner… Si j’avais, comme c’était mon devoir, supplié le pauvre Austin de ne pas…

— Ma bonne et chère mère, vous vous accusez de ce qui fut, ce semble, le malheur de mon oncle… car je suis sûr qu’il n’y a pas même de sa faute à lui. (Je ne disais pas là ce que je pensais.) Non, rejetez la faute sur les épaules du vrai coupable… sur les défuntes épaules de cet horrible ancêtre, William Caxton l’imprimeur ; car, quoique je ne connaisse pas encore les détails de ce qui est arrivé, je gagerais que cela se rapporte à cette fatale invention de l’imprimerie. Allons, allons… Mon père va bien, n’est-ce pas ?

— Oui, Dieu merci !

— Et vous aussi, et moi, et Roland, et la petite Blanche ! Ah ! mais vous pouvez bien remercier Dieu, puisque vos véritables trésors sont intacts. Eh, bien ! asseyez-vous et expliquez-moi tout, je vous prie.

— Je ne puis rien expliquer. Je ne comprends qu’une chose, c’est que lui, mon frère, a entraîné Austin dans… dans… »

Nouveau torrent de larmes.