Page:Bulwer-Lytton - Aventures de Pisistrate Caxton.djvu/483

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Étant arrivé à Londres, il s’informa de moi à cet hôtel du Strand, que je lui avais indiqué ; il apprit où nous étions ; mais un soir qu’il passait dans notre rue, il vit mon oncle à la fenêtre. Le reconnaître et s’enfuir fut l’affaire d’un instant. Comme il avait alors quelque argent, il abandonna brusquement la troupe dont il faisait partie, et résolut de retourner en France pour y essayer d’un genre de vie plus honorable. Dans la liberté qu’il avait conquise il n’avait pas trouvé le bonheur, ni, dans la vie de chevalier d’industrie dont son père avait cherché vainement à l’écarter, l’espace qu’il fallait à l’ambition qui commençait à le dévorer. Le plus honnête de ses amis était son ancien précepteur ; il alla le voir, mais il le trouva marié. Depuis qu’il avait des enfants, un grand changement s’était opéré dans ses idées ; il ne lui semblait plus moral de soutenir un fils dans sa rébellion contre son père. Vivian témoigna par de fiers sarcasmes combien il était mécontent de l’accueil qu’il avait reçu ; aussi le pria-t-on poliment de quitter la maison. Il se remit alors à vivre de son adresse à Paris ; mais il y trouva une foule de gens plus adroits que lui. Il eut des querelles avec la police, non pour quelque action déshonnête dont il se serait rendu coupable, mais par suite de sa liaison inconsidérée avec des individus moins scrupuleux que lui, et il jugea prudent de quitter la France. Ce fut alors que je le rencontrai déguenillé et sans ressources dans les rues de Londres.

Cependant, après les premières vaines recherches, Roland avait cédé à l’indignation et au dégoût qui, depuis longtemps, couvaient dans son sein contre un fils qui avait rejeté son autorité parce qu’elle le préservait du déshonneur. Ses idées sur la discipline étaient sévères, et la patience était presque arrachée de son cœur. Enfin il se crut assez fort pour abandonner son fils, pour le désavouer, pour dire : « Je n’ai plus de fils. » Ce fut dans cette disposition qu’il nous fit sa première visite. Mais lorsque, dans cette soirée mémorable où il raconta à ses auditeurs émus la sombre histoire des douleurs d’un père, la vive sympathie d’Austin devina la cause de la tristesse de Roland, il ne fallut pas de grands efforts à mon père pour persuader à ce cœur désolé qu’il n’avait pas encore épuisé tous les moyens de retrouver le fils errant et de le faire revenir auprès de lui. Roland partit