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Angleterre. » Puis il ajoute tout bas : « Si jamais vous avez meilleure opinion du dépôt de grog et de vivres, mon neveu, vous trouverez sous cette poitrine un cœur d’oncle ! »


CHAPITRE II.

Il faisait nuit lorsque Vivian et moi nous revînmes lentement à la maison. La nuit en Australie ! il est impossible de décrire sa beauté. Dans ce nouveau monde, le ciel paraît plus rapproché de la terre. Les étoiles sont si brillantes qu’elles semblent sorties fraîchement des mains du Créateur. Et la lune est comme un grand soleil d’argent, tant le moindre objet qu’elle éclaire est blanc et distinct[1]. Parfois un son vient rompre le silence, mais un son tellement en harmonie avec la solitude qu’il ne fait qu’ajouter à ses charmes. Écoutez ! c’est la voix d’un oiseau de nuit qui sort du milieu des rochers grisâtres dont ce vallon est entouré. Écoutez ! lorsque la nuit s’avance, c’est l’aboiement lointain d’un chien de garde, ou le hurlement étrange de ses frères sauvages contre lesquels il défend le troupeau. Écoutez encore ! l’écho s’empare de ces sons et les promène gaiement de colline en colline, loin, bien loin, plus loin encore, jusqu’à ce que tout rentre dans le silence et que les fleurs pendent sans bruit au-dessus de votre tête, quand vous traversez un bosquet de gommiers gigantesques. L’air est littéralement chargé de parfums, et cette surabondance affecte presque péniblement l’odorat. Vous hâtez alors le pas, vous entrez dans la plaine immense où rien n’intercepte la clarté de la lune, et, à travers les tiges sveltes des arbres à thé, vous apercevez le cours lumineux de la rivière dont vous

  1. M. Wilkinson dit, dans son précieux ouvrage sur l’Australie méridionale, ouvrage à la fois si pratique et si pittoresque : « Il m’est fréquemment arrivé de voyager par une de ces nuits. Je laissais mon cheval aller à sa volonté le long de la route, et je chassais l’ennui du chemin en lisant au clair de lune. » (Note de l’auteur.)