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Corbeau sont montés au perchoir ; mais leurs efforts ont été vains, malgré les compliments qu’elles m’ont fait sur ma basse-taille, qui deviendrait fort belle si je voulais la cultiver. Heureusement pour les oreilles de la société, cette tentative est abandonnée.

Ma mère travaille à sa tapisserie sur le dessin le plus à la mode : un jeune troubadour jouant du luth sous un balcon couleur de saumon. Les deux petites filles regardent la tapisserie, prématurément amoureuses, je crois, du troubadour.

Blanche et moi, nous nous sommes retirés dans un coin, et par une étrange illusion nous nous croyons invisibles. C’est dans ce coin que se trouve le berceau du néogilos. Ce n’est pas notre faute s’il est là ; Roland l’a voulu. L’enfant est si sage ! il ne pleure jamais. Du moins Blanche et ma mère le prétendent. Ce qu’il y a de certain, c’est qu’il ne pleure pas ce Soir.

Cet enfant est vraiment une merveille. Il savait sans doute Ce que nous désirions le plus au moment de sa naissance, et il a agi en conséquence de nos désirs. Contrairement à tous les usages, Roland n’a pas voulu qu’une femme, mère ou nourrice, le tînt sur les fonts baptismaux ; mais il a penché lui-même sur le nouveau chrétien son visage basané, me rappelant cet aigle qui cacha un enfant dans son aire, et le protégea de ses ailes qui avaient lutté contre la tempête. À partir de ce moment, l’enfant, qui reçut le nom d’Herbert, reconnut Roland mieux que sa nourrice et même que sa mère ; il parut deviner qu’en lui donnant ce nom nous avions voulu rendre une seconde fois son fils à Roland. Jamais le vieillard ne s’approche de l’enfant qu’il ne sourie, ne pousse de petits cris de joie, et n’étende vers lui ses bras mignons.

Donc, Blanche et Pisistrate sont assis auprès du berceau et s’entretiennent à voix basse, quand tout à coup mon père repousse le paravent et s’écrie :

« Ah ! voilà l’ouvrage terminé ! et maintenant on peut le mettre sous presse quand on voudra. »

Il y eut une averse de félicitations que mon père essuya avec son égalité d’âme ordinaire. Puis, s’approchant de la cheminée, la main sous son gilet, il dit d’un air rêveur :

« Parmi les dernières illusions de l’erreur humaine, j’ai eu à indiquer le rêve de Rousseau sur la paix perpétuelle, et toutes les rêveries pastorales du même genre, lesquelles ont