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CHAPITRE VI.

« Il ne fait jamais deux heures de suite le même temps dans ce pays, » dit mon oncle Roland lorsque, après le dîner ou plutôt après le dessert, nous rejoignîmes ma mère au salon.

En effet, une pluie fine et froide était survenue pendant les deux dernières heures, et, quoiqu’on fût en juillet, il faisait aussi froid qu’en octobre. Ma mère me dit quelque chose à l’oreille et je sortis. Dix minutes après, les bûches (car nous demeurions en un pays de forêts) flambaient joyeusement dans la grille. Pourquoi ma mère n’avait-elle pas sonné et ordonné à la servante d’allumer le feu ? Cher lecteur, le capitaine Roland était pauvre et faisait de l’économie une vertu de premier ordre.

Les deux frères approchèrent leurs chaises du foyer, mon père à gauche, mon oncle à droite ; ma mère et moi, nous nous assîmes pour jouer au jeu du renard et des oies.

On apporta le café… une tasse pour le capitaine, car le reste de notre société évitait ce breuvage échauffant. Et cette tasse était ornée du portrait de… Sa Grâce le duc de Wellington !

Pendant notre visite au camp romain, ma mère avait emprunté la chaise de M. Squills et poussé jusqu’à notre ville de marché, dans le dessein exprès d’offrir aux yeux du capitaine la figure aimée de son vieux général.

Mon oncle changea de couleur, se leva, porta à ses lèvres la main de ma mère et se rassit en silence.

« J’ai ouï dire, dit le capitaine un moment après, que le marquis de Hastings, qui est de la tête aux pieds un vrai soldat et un vrai gentilhomme (ce qui n’est pas peu dire, vu que sa taille mesure soixante-quinze pouces), lorsqu’il reçut à Donnington Louis XVIII exilé, meubla l’appartement de Sa Majesté exactement comme celui qu’elle avait occupé aux Tuileries. C’était là une attention royale (vous savez que milord Hastings