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— Dites-lui cela, je vous en prie. Pour vous, Primmins…

— Oui, madame.

— Je crains qu’on ne néglige votre maître. Et (ici les lèvres de ma mère s’approchèrent tout près de l’oreille de Mme Primmins) veillez vous-même à ce que… son bonnet de nuit soit bien aéré.

— Quelles bonnes créatures que ces femmes ! » se dit M. Squills lorsque, après avoir renvoyé tout le monde, à l’exception de Mme Primmins et de la garde-malade, il se dirigea vers le cabinet de mon père. Ayant rencontré le domestique dans le corridor : « John ! dit-il, servez le souper dans la chambre de votre maître, et faites-nous du punch, entendez-vous ?… un punch fort ! »


CHAPITRE II.

« Monsieur Caxton, comment donc êtes-vous arrivé à vous marier ? » demanda brusquement M. Squills, les pieds posés sur les chenets pendant qu’il agitait son punch.

C’était là une question d’intérieur dont beaucoup de gens eussent pu se fâcher avec raison ; mais mon père savait à peine ce que c’était que de se fâcher.

« Squills, dit-il en s’éloignant de ses livres et en posant confidentiellement un doigt sur le bras du chirurgien ; Squills, je serais bien aise moi-même de savoir comment je suis arrivé à me marier. »

M. Squills était un homme jovial, au cœur bon, un homme gros et robuste, avec de belles dents qui rendaient son rire aussi agréable aux yeux qu’aux oreilles. M. Squills était en outre un peu philosophe à sa manière ; il avait étudié la nature humaine en guérissant ses maladies, et il avait coutume de dire que M. Caxton était lui-même un livre meilleur que tous ceux qu’il avait dans sa bibliothèque. M. Squills se mit à rire en se frottant les mains.

Mon père reprit du ton rêveur d’un moraliste :