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Page:Bulwer-Lytton - Mon roman, 1887, tome 2.djvu/199

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— Est-ce qu’elle se meurt ?

— Je n’en sais rien. Que n’est-elle morte auparavant ! murmura entre ses dents mistress Avenel, mais le docteur Morgan est un digne homme et un homme discret.

— Un vrai bleu ! » dit le pauvre John comme si son esprit eût été égaré, et se levant avec difficulté, il regarda fixement sa femme, puis secoua la tête et partit.

Deux heures plus tard une petite charrette couverte s’arrêta devant le cottage de mistress Avenel. Un jeune homme pâle et mince, vêtu comme un artisan dans ses habits du dimanche, en descendit d’abord, puis une figure commune mais honnête et bonne se pencha vers lui en souriant, et deux bras sortant de dessous un manteau rouge tendirent un enfant que le jeune homme prit avec tendresse. Le baby était maussade et chétif, il se mit à pleurer. Le père le promena et le secoua de l’air d’un homme habitué à ces fonctions.

« Il sera sage quand nous serons dans la maison, va, Mark, dit la jeune femme en tirant des profondeurs de la charrette un large panier contenant de la volaille et du pain de ménage.

— N’oublie pas les fleurs que nous a données le jardinier du squire, » dit Mark le poète.

Sans avoir besoin du secours de son mari, la jeune femme descendit avec le panier et le bouquet, rajusta son manteau, déchiffonna sa robe et dit :

« C’est singulier ; ils n’ont par l’air de nous attendre. Comme la maison est silencieuse ! Frappe ; il n’est pas possible qu’ils soient encore couchés. »

Mark frappa ; pas de réponse. Une lumière passa rapidement devant les fenêtres du premier étage, mais personne ne vint ouvrir. Mark frappa de nouveau. Un monsieur vêtu du costume ecclésiastique et venant du château, s’arrêta de l’autre côté de la route au moment où Mark frappait pour la seconde fois et dit poliment :

« N’êtes-vous pas les jeunes gens dont Avenel m’a dit ce matin qu’il attendait la visite ?

— Oui, monsieur Dale, dit mistress Fairfield faisant la révérence. Vous vous souvenez de moi ! et voici mon bon et brave mari !

— Quoi ! Mark le poète ? dit le vicaire de Lansmere en souriant. Il vient faire des quatrains pour les élections.

— Des quatrains, monsieur ! s’écria Mark d’un air indigné.

— Burns a fait des quatrains, » dit M. Dale avec douceur.

Mark ne répondit pas, mais frappa de nouveau à la porte.

Cette fois un homme à l’air ému et agité se présenta sur le seuil.

« M. Morgan ! s’écria le vicaire alarmé ; personne n’est malade ici, j’espère ?

— Ah ! c’est vous, monsieur Dale ! Entrez, entrez ; j’ai un mot à vous dire. Mais qui diable sont ces gens-là ?

— Monsieur, dit Mark, poussant la porte pour entrer, je me nomme Fairfield, et ma femme est la fille de M. Avenel.

— Ah ! c’est Jeanne, et son baby avec elle. Bien, bien, entrez,