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Page:Bulwer-Lytton - Mon roman, 1887, tome 2.djvu/373

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maintenant me faire de tort ; les votes qu’il m’a obtenus au détriment d’Egerton sont donnés. Les membres du comité à la vérité voteront probablement contre moi, mais nous avons encore le corps de réserve d’Avenel. Nous pouvons regarder l’élection comme enlevée. À notre retour, nous trouverons sans doute au château le squire avec l’argent destiné à racheter mon domaine héréditaire ; le docteur Riccabocca est rentré en possession des titres et des domaines de Serrano ; qu’ai-je à craindre de lord L’Estrange ? Malgré tout, je n’aime pas son regard.

— Bast ! Vous avez justement fait ce qu’il désirait au fond. Nous voici à la tente. Ah ! il y a une nouvelle affiche, Avenel est de quarante voix en avant de vous, mais vous en avez trente de plus qu’Egerton ; et Léonard Fairfield est toujours le dernier. Mais où est-il donc, ainsi qu’Avenel ? »

Les deux candidats avaient disparu ; ils étaient peut-être dans la salle de leur comité. Aussitôt que les portes avaient été refermées sur Randal et le baron et au milieu du tumulte qui avait suivi leur départ, Harley s’était élancé sur la table. Son action et l’expression de sa physionomie commandèrent sur-le-champ le silence.

« Messieurs, dit-il, nous sommes maîtres de faire nommer l’un de nos candidats et de choisir entre eux deux. Vous avez entendu M. Leslie et le baron Lévy. À leur exposé, je n’ai qu’une chose à répondre : M. Egerton est nécessaire au pays, et, quoi qu’il en soit de sa santé et de ses affaires, il est prêt à répondre à son appel. S’il n’a pas sollicité vos votes, s’il n’est pas parmi vous en ce moment, vingt années vouées au service de l’Angleterre plaident sa cause et le remplacent. Lequel donc des deux candidats choisirez-vous pour vous représenter : un homme d’État illustre ; ou un jeune homme imberbe ? Tous deux ont de l’ambition et des talents, l’un les a identifiés avec l’histoire de son pays, et comme on l’allègue aujourd’hui à son préjudice, avec un dévouement qui a détruit une santé vigoureuse et ruiné une fortune princière. L’autre témoigne de son ambition en vous invitant à le préférer à son bienfaiteur, et prouve ses talents par son habileté à justifier son ingratitude. Choisissez entre les deux — un Egerton ou un Leslie.

— Vive Egerton ! cria l’assemblée d’une seule voix, et cette acclamation fut suivie de sifflets et de grognements à l’adresse de Leslie.

— Mais, dit un membre grave et prudent du comité ; avons-nous réellement le choix ? N’est-il pas plutôt entre les mains des jaunes ? Votre Seigneurie ne se flatte-t-elle pas ?

— Ouvrez la porte du fond ; une députation de nos adversaires attend dans le corridor. Faites-la entrer. »

Le comité garda le silence tandis qu’on obéissait à l’ordre d’Harley, et bientôt, à la grande surprise de tous, Léonard Fairfield en personne, accompagné de six des principaux membres du parti jaune, entra dans la chambre.

« Vous avez une proposition à nous faire, monsieur Fairfield, en