Page:Bulwer-Lytton - Pelham, 1874, tome I.djvu/9

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CHAPITRE II


À dix ans j’allai à Eton. J’avais été élevé jusqu’alors par ma mère qui, en sa qualité de parente éloignée de lord *** (celui qui a publié des « Pensées sur l’art culinaire » ), se croyait en possession d’un droit héréditaire au mérite littéraire. L’histoire était son fort ; en effet elle avait lu tous les romans historiques du jour, aussi mon éducation fut-elle particulièrement soignée au point de vue de l’histoire.

Il me semble en ce moment encore voir ma mère près de moi, couchée sur un sopha et me répétant des histoires sur la reine Élisabeth et lord Essex, puis me parlant d’une voix languissante, renversée en arrière, dans une pose pénible, des avantages du goût en matière littéraire, et m’avertissant que je ne devais jamais lire plus d’une demi-heure de suite, de peur d’attraper mal à la tête.

J’allai donc à Eton, et dès le second jour de mon arrivée je fus à moitié assommé pour avoir refusé, avec tout l’orgueil d’un Pelham, de rincer les tasses à thé. Je fus sauvé des griffes de mon tyran par un enfant qui n’était guère plus âgé que moi, mais qui, en raison de sa taille, était réputé le plus redoutable champion de toute l’école. Son nom était Réginald Glanville ; à partir de ce moment nous devînmes inséparables, et notre amitié dura pendant tout le temps qu’il resta à Eton, c’est-à-dire jusqu’à l’année qui précéda mon départ pour Cambridge.

Son père était un baronnet, d’une famille très-ancienne et