Page:Bulwer-Lytton - Pelham, 1874 tome II.djvu/49

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

C’était un traité des participes grecs. Je crus que j’allais me trouver mal ; mais en voyant le regard inquiet que me lançait le pauvre auteur, je m’efforçai de donner à ma physionomie une expression de joie et j’eus l’air de lire et de commenter ces difficiles nugæ avec un intérêt proportionné au sien. Pendant ce temps le jeune homme était rentré. Il avait toute cette délicatesse de sentiments que donne toujours la culture de l’esprit, de quelque nature qu’elle soit. Il vint vers son oncle avec un pied de rouge sur ses pauvres joues creuses, et lui murmura à l’oreille quelque chose dont il n’était pas difficile de deviner le sens, à voir le trouble et l’embarras terrible qui en furent la conséquence.

« Allons, lui dis-je, notre connaissance date de trop loin pour qu’il y ait entre nous de la cérémonie. Votre placens uxor, comme toutes les dames en pareil cas, pense que votre invitation a été faite un peu sans réflexion ; et en vérité, j’ai une si longue course à faire pour m’en retourner que j’aimerais autant venir manger vos huîtres un autre jour.

— Non, non, me dit Clutterbuck, avec une vivacité dont son tempérament flegmatique était rarement susceptible, non, je vais aller la voir et lui faire entendre raison moi-même. Femmes, obéissez à vos maris, a dit le grand prédicateur ; » et l’ancien prix d’honneur des sciences se leva avec une telle impétuosité qu’il en renversa sa chaise.

Je l’arrêtai et lui dit : « Laissez-moi y aller moi-même, si vous voulez que je dîne avec vous. Le sexe est toujours favorablement disposé pour un étranger, et il est probable que je serai plus persuasif que vous, malgré votre autorité légitime. »

Ce disant, je quittai la chambre avec une curiosité plus douloureuse qu’agréable, pour me présenter à la femme de mon camarade. Je m’adressai au domestique et lui dis de me précéder et de m’annoncer.

Je fus introduit à l’instant même dans la chambre où j’avais aperçu tous les signes de l’inquiétude et de la curiosité féminine ainsi que je l’ai dit plus haut. Là je découvris une petite femme vêtue d’une robe à la fois élégante et malpropre, avec un nez pointu, de petits yeux gris sans éclat ;