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Page:Burckhardt - Le Cicerone, 1re partie, trad. Gérard, 1885.djvu/106

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avec quelle riche floraison peuvent s’épanouir les feuilles d’acanthe quand elles n’ont pas d’entablement à soutenir comme chapiteau ! Que l’on compare aux colonnes des temples les supports de maint bassin ou candélabre, et l’on devra reconnaître la raison de leur forme si renflée qui diminue à la base, et des cannelures obliques qui règnent autour : le support devait répondre à la libre ornementation de l’objet qu’il supportait.

D’autres éléments de ces ouvrages sont naturellement du genre purement décoratif ; néanmoins le sentiment architectural domine toujours et préserve la richesse de l’enflure et de la diffusion. D’ailleurs, pour beaucoup de ces objets, les reliefs demandaient, en vue de leur effet, une sage limitation des détails simplement décoratifs.

Les pieds qui sont conservés représentent, comme on sait, des pattes de lion fortes et nerveuses, et non des griffes débiles. Aux trônes et aux tables, la patte de lion continue sa ligne ornementale d’un beau mouvement jusqu’à l’articulation du genou ; à cet endroit, la peau se transforme en une sorte de feuille d’acanthe, et le buste d’un sphinx, une tête de lion ou de griffon barbu vient au-dessus comme support ou couronnement ; les ailes du sphinx ou du lion servent alors de décoration aux côtés du trône ou de la table. Les corniches horizontales sont généralement très frêles, elles ne sont qu’une réminiscence architecturale, mais leur couronnement est avec raison plus riche : il figure une rangée de palmettes. Des têtes de bélier, souvent d’une très belle facture, sculptées aux coins, signifient que l’objet est consacré aux cérémonies du culte et sont une allusion directe aux sacrifices. Le contour inférieur des vases imite les stries cannelées des coquillages ou bien un riche feuillage ; la partie supérieure, qui forme le vase proprement dit, est réservée aux reliefs, mais le bord en se rabattant montre une belle garniture en forme d’oves. Le haut des anses est parfois contourné en plusieurs spirales de forme élastique : il en est ainsi du vase colossal, très simple d’ailleurs, qui se trouve dans le parvis de S. Cecilia à Rome [a], et du vase plus petit qui orne l’escalier du Palais Mattei [b]. À leur partie inférieure, les anses sont décorées de masques et d’autres têtes. Parfois les supports de vases, de tables, etc., représentent des êtres vivants travaillés en ronde bosse ; ainsi une urne du Vatican, au Belvédère [c], dans la salle voisine du Méléagre, repose sur les queues entrelacées de trois chevaux marins ; dans le même palais (Galleria de’ Cantelabri) [d], un bassin est soutenu sur les épaules de trois satyres portant des outres, etc. La forme triangulaire de la plupart des supports avait son origine dans celle des trépieds, pour lesquels surtout ou travaillait autrefois des piédestaux de luxe l’art en usa volontiers dans la suite pour les candélabres, les vases, etc., à cause de l’effet léger et gracieux, et pour les distinguer de l’architecture.

Ces ouvrages sont très souvent restaurés à l’aide de fragments relativement petits, et par analogie. Si l’on voit deux candélabres identiques,