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Page:Burckhardt - Le Cicerone, 1re partie, trad. Gérard, 1885.djvu/146

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poue [g], au Musée de Naples (3e corridor), d’une date plus moderne l’art tombait dans le doucereux. Il faut supprimer en imagination la choquante restauration des bras, et l’Amour placé arbitrairement auprès de la déesse. Quoi qu’on en dise, les pieds même du petit dieu ne sont pas anciens, mais seulement la surface du socle, qui devait supporter un tout autre motif, tel qu’un trophée ou un objet quelconque que la déesse touchait de la main. Pour l’exécution, cette Vénus reste bien loin de celles que nous citerons plus bas. Dans la suite, l’art se plut à reproduire le motif en changeant l’idée dans la belle statue romaine de Vénus, très jeune et nue [a], qui ceint le glaive de Mars (Uffizi, corridor de communication ; un double à Berlin),

On ne peut s’étonner que l’art romain se soit servi de ce motif pour figurer la Victoire, le génie féminin de la guerre heureuse. Telle est la magnifique Victoire d’airain [b] qu’on voit au Museo Patrio de Brescia ; rappelant déjà le visage de la déesse, elle montre, peut-être assez fidèlement, à nos yeux l’attitude et le mouvement de la Vénus victrix ; seulement elle écrit sur un bouclier et son torse même est couvert d’une tunique légère drapée avec une grâce piquante. Elle est debout, le pied gauche sur un casque (restauré), et appuie le bouclier (restauré) sur sa hanche gauche couverte d’un pan de draperie. Sur les médailles du premier siècle ap. J.-C., ce type de Victoire n’est pas rare.


Le type emprunté à Praxitèle et à sa Vénus de Cnide montre une conception différente. L’expression divine est changée simplement en un charme féminin merveilleux qui se manifeste à nu, mais d’une manière chaste, par des formes développées. La déesse n’est d’abord représentée que dans une attitude humaine : elle va se baigner ou elle sort du bain ; c’est ce que montre le vase à onguent sur lequel elle dépose quelquefois son vêtement d’une main, tandis que de l’autre elle se couvre avec un pan de la draperie ; l’expression n’est ni inquiète ni coquette, mais telle qu’il convient à une déesse. Souvent elle a les deux mains libres, l’une étendue devant la poitrine, l’autre devant son sein. L’aisance et en même temps le calme de son attitude sont indicibles ; elle semble être venue en planant. Les traits toujours nobles de sa tête un peu étroite indiquent à peine la langueur.

Les divers motifs que nous venons de décrire ont été, pour la plupart, souvent reproduits. Beaucoup d’entre eux ont subsisté jusqu’aux derniers temps de Rome. Nous ne citerons que les œuvres les plus importantes.

La Vénus [c] du Vatican (Sala a Croce greca), avec son vêtement moderne en tôle et sa belle tête qui a encore une grande ressemblance avec celle de la Vénus victrix, est la meilleure reproduction qui existe de la Vénus de Praxitèle. Celle du Palais Chigi à Rome [d] est une copie