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Page:Burckhardt - Le Cicerone, 1re partie, trad. Gérard, 1885.djvu/155

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visi [a]. — Dans l’escalier du Palais des Conservatoires au Capitole, une statue qu’on croit être Uranie [b] ; en tout cas, la, draperie est fort belle. — Les deux grands bustes placés à l’entrée de la Sala Rotonda du Vatican invitent à une comparaison avec les Muses ; ils représentent la Comédie et la Tragédie [c], personnifiées ailleurs par les Muses : ce sont des têtes d’une beauté mûre, d’une expression sérieuse et douce, mais sans charme et d’un travail trop pénible dans les détails et trop lisse.

Au Musée de Naples [d], le visiteur remarque, dans le veistibule du bas, une de ces Muses colossales que l’on sculptait pour la décoration des grands théâtres. Le travail superficiel et l’exécution faite en vue d’une niche, montrent clairement qu’elle était destinée à un rôle décoratif. Elle est faite de manière à n’être vue que par devant, ce que prouve le torse incliné par rapport aux hanches, et aux cuisses, ainsi que le profil de la tête. On l’appelle Uranie, et la main gauche portant le globe qui a motivé ce nom, est très probablement ancienne ; d’après le type c’est une sœur de la Melpomène de Paris, mais un peu différente. Tout a un cachet de grandeur et de simplicité : le long vêtement, drapé par devant à plis droits, le péplum attaché par une boucle aux épaules, le pied gauche porté en avant et la flexion de la jambe droite. La tête est presque d’une déesse, et semble tenir le milieu entre Junon et Vénus. — Ce n’était pas absolument nécessaire, car la belle tête de la Villa Borghese [e] (salle principale)} qui a été prise à tort pour une Junon, prouve que l’expression juvénile et charmante du type de Muse proprement dit peut aussi être reproduite dans des proportions colossales. À peu près semblable, mais moins importante, est la figure colossale placée dans la cour du Palais Borghese, à Rome [f], désignée comme une Muse, et qui plus vraisemblablement représente un Apollon musagète.

Le Musée de Naples (salle 1) renferme encore un Apollon musagète [g] assis, avec des draperies de porphyre, et les extrémités de marbre blanc. L’art romain postérieur aimait ces sortes d’associations, et d’abord par la raison que la pierre dure et sa mise en œuvre étaient très coûteuses. Quand l’œil n’est plus ébloui par le contraste des couleurs et le miroitement résultant du polissage, il découvre, dans la plupart des sculptures de ce genre, comme dans celle-ci, une absence d’idée, naturelle d’ailleurs dans ces œuvres où la matière passe avant la forme. Cette variété de couleurs a été une des causes de la décadence de la sculpture antique.

Dans la salle des Muses (salle IV) on a réuni plusieurs statues que la restauration et l’arbitraire seuls ont fait ranger dans cette catégorie. On pent y compter même la remarquable statue drapée que l’on a appelée ici et ailleurs Polymnie [h], etc. Les Muses authentiques, par exemple Melpomène et une Euterpe, sont d’un travail bien médiocre. La soi disant Terpsichore, avec la tunique ceinte très haut et le péplum traînant, comme l’Uranie que l’on voit dans le vestibule, est certainement un Apollon musagète, réduction d’un modèle colossal.