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Page:Burckhardt - Le Cicerone, 1re partie, trad. Gérard, 1885.djvu/22

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sion spontanée, n’est déjà pas, le voyageur en conviendra, d’un cicerone ordinaire d’est la marque d’un psychologue et d’un critique. Et de fait, en lisant les descriptions de Burckliardt, nul n’éprouvera la moindre contrainte et ne sentira la moindre pression exercée sur ses goûts. Mais ce livre nous introduit au coeur de la place, il recompose pour nous les différents milieux dans lesquels l’art et les artistes se sont développés. Ce n’est pas Burckhardt, c’est l’histoire elle-même qui apprécie et qui juge. Les émotions qui naissent en nous, les jugements qui se formulent dans notre esprit, restent les nôtres tout en appartenant à l’auteur ; nous refaisons nous-mêmes le travail qu’il a fait et nous avons encore quelque droit à nous attribuer des conclusions qui sont les siennes. Jamais il n’y eut méthode plus libérale, et jamais le moi, si haïssable, ne s’est mieux effaeé pour nous donner l’illusion, je me trompe, pour nous laisser le mérite de notre propre originalité.

Telle est l’œuvre de Jacob Burkhardt elle est bien d’accord avec sa vie elle-même, avec les études et les influences de la jeunesse avec les opinions et les goûts qui en sont résultés. C’est une harmonie de plus chez cet esprit si jaloux de la proportion, de la mesure, si pénétré de cette belle pensée des anciens, que la vie est aussi une œuvre d’art, et que, selon la parole d’un des derniers Alexandrins, chacun sculpte sa propre statue.

A. Gérard.