Aller au contenu

Page:Burckhardt - Le Cicerone, 1re partie, trad. Gérard, 1885.djvu/86

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

supérieur était corinthien, si les fragments qui nous restent lui appartenaient. La nef centrale était probablement à ciel ouvert (des gouttières sont visibles sur le sol) et le portique l’entourait complètement. Le tribunal, placé tout au fond, était une construction plus élevée avec un petit portique spécial, de style corinthien (?). La perspective intérieure doit avoir eu un charme singulier. La construction des colonnes ioniques inférieures est très intéressante : ce sont des feuilles de brique concentriques, déjà toutes cannelées à la surface et qui n’attendaient plus qu’un revêtement de stuc. Les colonnes engagées dans le mur, qui se rencontrent aux angles[1], sont, pour ainsi dire, l’esquisse de motifs auxquels l’architecture chrétienne devait donner leur entier développement. Le Chalcidicum [a] qui s’élève en face, et le Panthéon [b], ont une destination si peu certaine, que nous nous contentons de les mentionner, pour ne pas les omettre complètement dans la liste des monuments publics. Le Chalcidicum nous a laissé un magnifique chambranle de porte orné de pampres auxquels des figures d’animaux donnent encore plus de vie, et qui maintenant forme au Musée de Naples [c] l’entrée de la salle de Jupiter.

La destination de la basilique (affaires de bourse, rendez-vous, débats judiciaires) n’était cependant pas liée à cette disposition qui, à Rome et ailleurs, était la plus habituelle. Nous savons, par le fait, que des plans tout différents ont été essayés, selon les idées de l’architecte et les moyens dont il disposait. On reconnaît un essai de ce genre dans le Temple de la Paix à Rome [d], qui est une basilique érigée par Maxence (306-312). Elle n’a de commun avec la disposition ordinaire que les trois nefs et, à l’extrémité, la niche[2] (qui n’est plus visible aujourd’hui). C’est, d’ailleurs, un édifice voûté dont le vaste diamètre permettait le va-et-vient le plus animé d’une grande foule, et par tous les temps, grâce au dôme qui couvrait la nef centrale. Cette innovation si importante, — un système de trois voûtes d’arête dans le sens de la longueur pour la nef du milieu et de trois voûtes de plein cintre plus basses pour les nefs latérales, — avait déjà été conçue et perfectionnée dans la construction des thermes ; aujourd’hui, le revêtement, c’est-à-dire les colonnes saillantes, de style corinthien, adossées à chaque pilier principal, a disparu même de la partie qui nous reste. La seule colonne sauvée de la destruction a été placée par Paul V à S. Maria Maggiore. Elles ne supportaient la voûte qu’en apparence, non en réalité ; aussi l’œil ne les regrette-t-il pas, non plus que la colonnade qui régnait sans doute le long des murailles supportant les trois voûtes latérales ; seulement elles produisaient autrefois un effet d’ensemble vraiment magnifique. À en juger par les débris, l’an-

  1. Cette disposition, entre autres, se voit encore dans le Temple d’Hercule à Brescia [e].
  2. Les soubassements de cette niche se trouvent dans les bâtiments qui font face au Capitole. La niche actuelle, qu’on voit dans la nef latérale, à droite, est une annexe plus moderne.