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Page:Burckhardt - Le Cicerone, 2e partie, trad. Gérard, 1892.djvu/339

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PREMIÈRE RENAISSANCE.

trer ailleurs de pareille. Nous voulons parler du Palazzo di Corte [a], le Palais ducal de Mantoue, bâti pièce par pièce par les Gonzague, en partie d’après les plans de Jules Romain. (Pour les fresques, voir plus bas.) À ce dernier appartient entre autres la belle ordonnance de la Sala de’ marmi (autrefois salle des antiques), tout entière revêtue de stuc, et peinte dans le style des Thermes, avec voûtes en berceau et décorée de niches sur les petits côtés. Dans chaque chambre, l’ornementation de la voûte ou du plafond et de la frise courant au-dessous est, par la forme, le relief, la couleur, proportionnée à l’ensemble ; et cela depuis les plus grandes salles jusqu’aux plus petits appartements. Parmi ces derniers, le précieux Camerino d’Isabelle de Gonzague (de la famille d’Este), avec sa voûte en caissons dorés sur fond bleu, est d’une époque antérieure ; il est reconnaissable à la devise de la princesse : « Nec spe, nec metu », et se trouve dans cette partie du palais qui, à cause de la vue sur le lac, s’appelle le Paradis. La grande galerie, qui menace ruine, a contenu jusqu’en 1630 la célèbre collection de tableaux et de curiosités de la maison de Gonzague. Parmi les cours, il faut remarquer le Cortile di Cavallerizza, de style baroque. (L’ensemble, qui est dans un grand délabrement, ne révèle tout son prix qu’après plusieurs visites, quand la comparaison des différentes pièces devient possible. Quelques-unes des chambres n’ont été décorées qu’au temps du vice-roi Eugène de Beauharnais, dans un bon style Empire. Le Castello proprement dit, où se trouvent les fresques de Mantegna, n’est qu’extérieurement relié au palais)

Le Palazzo del Te [b], devant la ville, est tout entier l’œuvre de Jules Romain. Il sera question plus bas de l’architecture et des fresques ; dans plus d’une salle il est permis de regretter que le peintre à fresques ait eu le pas sur le décorateur, qui, en somme, nous plaît davantage. Dans la salle des Géants, les angles des murs et de la voûte sont abattus, et les terribles peintures passent impitoyablement par-dessus. De même, dans la salle de Psyché, la peinture se plie et replie jusque sur les angles, et l’échafaudage des festons y perd sa fermeté. Là, au contraire, ou la décoration maintient ses droits, l’œuvre de Jules Romain est souvent exquise. Il y a ici, de même, un sentiment admirable de la proportion dans l’ornementation de chacune des chambres selon sa grandeur et son importance, depuis la merveilleuse galerie principale, vers le jardin, jusqu’aux gracieux petits « gabinetti » (L’un de ces derniers avec une petite coupole octogonale ; un autre, oblong, avec des coquilles aux angles du plafond.) Dans la Sala de’ Caralli, avec les portraits en fresque des chevaux de luxe de ce haras, auquel d’abord l’édifice était destiné, la grande et rude cheminée en rustique est tout à fait à sa place. De l’autre côté du jardin, derrière, à gauche, il y a encore le Casino della Grotta : une Loggia librement décorée dans le style des Thermes, un jardinet, et la grotte elle-même avec ses dépendances, le tout d’une petitesse microscopique, mais un véritable joyau de l’art du temps.