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ET DU BEAU.

dre jamais de vue, de se le représenter sous l’aspect le plus agréable, d’en examiner jusqu’aux plus petits détails ; de revenir sur chaque jouissance particulière, de s’arrêter avec complaisance sur chacune, et de trouver à toutes mille nouvelles délices, inaperçues jusqu’alors. Le plaisir domine toujours dans le chagrin ; et il s’en faut de beaucoup que l’affliction que nous éprouvons ait quelque ressemblance avec la douleur absolue, qui est toujours odieuse, et dont nous nous délivrons aussitôt que nous en avons le pouvoir. L’Odissée d’Homère qui abonde en images naturelles et touchantes, n’en a pas de plus frappantes que celles que fournissent à Ménélas le sort infortuné de ses amis et la manière dont il sent ce malheur. Il avoue, à la vérité, que souvent il s’arrache à des réflexions si tristes ; mais il observe aussi que toutes tristes qu’elles sont, elles ne laissent pas de lui donner du plaisir.


Ἀλλ’ ἔμπης πάντας μὲν ὀδυρόμενος καὶ ἀχεύων,
Πολλάκις ἐν μεγάροισι καθήμενος ἡμετέροισιν
Ἄλλοτε μέν τε γόῳ φρένα τέρπομαι, ἄλλοτε δ’ αὖτε
Παύομαι αἰψηρὸς δὲ κόρος κρυεροῖο γόοιο.


« Dans les courts intervalles d’une douleur qui n’est pas sans délices, fidèle aux devoir