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CHAPITRE V

EMPÉDOCLE D AGRIGENTE

XCVII. — Pluralisme.

La croyance que toutes choses sont une était commune aux philosophes que nous avons étudiés jusqu’ici ; mais Parménide a montré que si cette chose unique est réellement, nous devons abandonner l’idée qu’elle puisse prendre différentes formes. Les sens, qui nous présentent un monde changeant et multiple, sont trompeurs. À cette conclusion, il n’y avait pas moyen d’échapper ; le temps était encore à venir, où l’on chercherait l’unité du monde en quelque chose que, de par sa nature même, les sens ne pourraient jamais percevoir.

Nous constatons donc que, de l’époque de Parménide à celle de Platon, tous les penseurs aux mains desquels la philosophie fit un réel progrès abandonnèrent l’hypothèse moniste. Ceux qui s’y tinrent adoptèrent une attitude cri* tique et se bornèrent à défendre la théorie de Parménide contre les opinions nouvelles. D’autres enseignèrent la doctrine d’Héraclite sous une forme exagérée ; quelques-uns continuèrent ù exposer les systèmes des premiers Milésiens. Ceci, naturellement, témoignait d’un manque ‘ d’intelligence, mais même ceux des penseurs qui comprirent qu’on ne pouvait laisser Parménide sans réponse étaient bien loin .d’être égaux ù leurs devanciers en force et en profondeur. L’hypothèse corporaliste s’était révélée incapable de supporter le poids d’une construction moniste ;