Page:Burnett - Le Petit Lord.djvu/241

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un aimable petit garçon, et quand il vous parlait on était content ; cela vous faisait du bien.

— C’est-à-dire, fit M. Hobbes, que c’est une pitié d’en avoir fait un comte ! Il aurait brillé dans l’épicerie ou dans les denrées sèches ; oui, il y aurait brillé !… »

Et il secoua sa tête d’un air plus triste que jamais.

Les deux nouveaux amis reconnurent bientôt qu’il n’était pas possible de dire en une seule fois tout ce qu’ils avaient à dire sur le petit lord ; il fut donc convenu que le lendemain soir Dick rendrait à M. Hobbes sa visite.

La proposition agréait fort à Dick. Il avait toujours mené une vie fort décousue, ne possédant ni feu ni lieu, ayant été, dès sa première enfance, privé de ses parents. Il avait vécu pendant quelque temps avec son frère aîné, Ben, qui avait pris soin de lui jusqu’à ce que Dick fût assez grand pour vendre des journaux et faire des commissions ; mais depuis longtemps il était abandonné à lui-même. Ce n’était pas un mauvais garçon, loin de là, et il avait toujours aspiré à une existence plus régulière. Depuis qu’il était maître d’un petit établissement, ses affaires prenaient une meilleure tournure, et il gagnait maintenant assez d’argent pour s’abriter toutes les nuits sous un toit, au lieu de dormir à la belle étoile, comme cela avait été longtemps son lot. Il commençait même à entrevoir la possibilité de louer une chambre, que peu à peu il meublerait de ses deniers ; mais la réalisation d’un pareil rêve était encore loin de son atteinte. En attendant, être invité à aller voir un respectable épicier, qui avait sa boutique au coin d’une rue et qui possédait un cheval et une voiture, était un événement dans son existence.