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VI


Plus M. Havisam voyait le petit lord et plus il se sentait subjugué par lui. Il pensait au vieux comte de Dorincourt assis dans la grande, sombre et splendide chambre de son château appelée la bibliothèque, malade, souffrant de la goutte et seul : entouré par le luxe et la grandeur, servi par un grand nombre de domestiques, mais n’ayant personne, près de lui pour l’aimer, parce que, dans tout le cours de sa longue vie, il n’avait réellement aimé personne que lui-même ; qu’il s’était toujours livré à ses goûts, à ses plaisirs et à ses penchants, sans jamais se soucier des goûts, des plaisirs, des penchants ou même des besoins de personne. Ses immenses richesses et le pouvoir que lui donnaient son nom et son rang élevé dans l’État lui avaient toujours semblé des avantages qui lui étaient départis pour le simple agrément du « Comte de Dorincourt », et pour qu’il en usât selon son bon plaisir. Maintenant qu’il était vieux, il ne lui restait, de sa vie passée que la maladie, une irritabilité extrême et un grand mépris pour le monde, qui le lui rendait bien. Il pouvait, il est vrai, remplir