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Page:Burney - Cecilia ou Memoires d une heritiere 6 an III.djvu/40

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j’allai même jusqu’à implorer sa pitié. Tout fut inutile ; elle fut également sourde à mes exhortations et à mes prières. Je passai des heures entières à ses pieds, jurant de ne point me relever qu’elle ne m’eût parlé… Ce fut sans aucun succès ; elle paraissait sourde, muette, insensible ; ses yeux éteints et sans mouvement annonçaient le plus affreux désespoir… ces yeux qui autrefois ne s’arrêtaient jamais sur moi qu’avec douceur et avec complaisance… Elle resta constamment assise sur la même chaise ; elle ne changea point d’habits ; on ne put jamais parvenir à l’engager à se coucher. Aux repas elle mangeait un peu de pain sec, et précisément ce qu’il en fallait pour l’empêcher de mourir de faim. Comment vous peindre mes alarmes, en voyant que rien n’était capable de la faire changer de résolution ?… C’est ainsi qu’elle hâta son dernier moment. Lorsqu’elle fut près d’expirer, elle m’avoua que, dès l’instant qu’elle était entrée dans la maison, elle avait fait vœu d’y vivre sans parler : pénitence qu’elle s’était imposée pour l’expiation de ses péchés. Je restai auprès