Page:Burney - Evelina T1 1797 Maradan.djvu/182

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de crise, l’opéra finit, et le monde sortoit en foule. J’entendis en même temps la voix de madame Duval qui descendoit de la galerie. Si mylord Orville avoit répété son offre, je l’eusse acceptée malgré sir Clément. Je n’avois plus un instant à perdre : « Vîte, m’écriai-je, s’il faut que je parte ». — Je m’arrêtai-là ; mais sir Clément prit ma main, me fit monter dans sa voiture, s’y jeta lui-même, et cria au cocher : Dans le Queen-Street. Mylord Orville me salua en souriant, et me souhaita le bon soir.

Il faut avouer qu’il me quitta là dans une situation des plus ridicules ; j’en eus bien du chagrin, et j’étois résolue de ne pas ouvrir la bouche pendant tout le chemin ; mais sir Clément trouva bientôt le moyen de me faire parler.

Il débuta par me faire ses plaintes de la répugnance que j’avois eue de me confier à lui, et il en demanda mes raisons. Faute d’avoir une meilleure réponse prête, je lui dis que j’avois craint de lui faire perdre son temps.

« Ah ! s’écria-t-il en s’emparant de ma main, si vous saviez avec quel ravissement je vous consacrerois tous les momens de ma vie, vous ne m’offenseriez point par une telle excuse ».