Page:Burney - Evelina T1 1797 Maradan.djvu/336

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me manquèrent ; je demeurai immobile ; incapable d’agir, glacée d’effroi.

L’étranger continua son chemin, et je le perdis bientôt de vue. Je tremblois comme une feuille ; mais la réflexion que je pourrois peut-être prévenir un malheur, me rendit mes esprits, et je me remis, soutenue par l’espérance de sauver cet infortuné.

Je résolus d’abord de courir vers M. Branghton ; mais tout pouvoit dépendre d’un seul instant. Je ne pris donc conseil que de mes craintes, et je montai au troisième étage.

Arrivée au haut de l’escalier, je m’arrêtai ; la porte de la chambre étoit entr’ouverte, et je pus distinguer ce qui s’y passoit.

J’apperçus un pistolet qui étoit posé sur la table ; l’étranger en tira un second de sa poche : il sortit quelque chose d’un petit sac de cuir ; après quoi il prit un pistolet dans chaque main, se jeta à genoux, et s’écria : « Pardonnez, ô mon Dieu » !

Dans ce moment, mes forces et mon courage me revinrent comme par inspiration ; je me précipitai dans la chambre, et je n’eus pas plutôt saisi son bras, qu’accablée de frayeur je tombai moi-