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Page:Burney - Evelina T2 1797 Maradan.djvu/92

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je ne m’arrêtai qu’à ce qu’il m’y disoit d’obligeant, et je fus si peu maîtresse de mes mouvemens, qu’il me fallut du temps pour me remettre. Je me promenai à grands pas dans ma chambre, et je me demandai à diverses reprises : « Seroit-il possible que mylord Orville t’aimât » ?

Mais ce songe fut bientôt dissipé, et je me réveillai pour éprouver des sensations très-différentes. Une seconde lecture du billet me dessilla les yeux ; je ne le reconnus plus, chaque parole me parut changée, chaque phrase choisie pour me faire rougir : mon étonnement fut extrême, et je n’en revins que pour m’abandonner à une juste indignation.

Je ne me fais point de peine d’avouer que j’ai commis une faute en écrivant à mylord Orville ; mais étoit-ce à lui de m’en punir ? Si je l’ai offensé, ne pouvoit-il pas prendre le parti de garder le silence ? Si la démarche que je me suis permise lui sembloit déplacée, ne devoit-il pas l’excuser par mon âge et par mon défaut d’expérience ?

Oh ! Marie, comme je me suis trompée sur le compte de cet homme ! ma plume essaieroit en vain de vous exprimer la haute idée que j’avois de lui. Si