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j’ai troublé la tranquillité du meilleur des hommes.

Je n’ai pas eu le courage de lui montrer cette cruelle lettre ; je ne pouvois me résoudre d’avilir à ses yeux celui que peu auparavant j’avois élevé jusqu’aux nues. Mon premier plan fut de garder par-devers moi le secret que vos instances amicales viennent de m’arracher : aujourd’hui je voudrois que je n’en eusse jamais fait un mystère à M. Villars. Que doit-il penser du sérieux qui, malgré moi, et contre ma coutume, m’accompagne par-tout ?

Ce que je crains le plus, c’est qu’il ne s’imagine que mon séjour à Londres ne m’ait dégoûtée de la campagne. Tout le monde s’apperçoit que je ne suis plus la même ; mon visage est pâle et défait, ma santé dérangée. On me le dit, on glose : mais ces critiques ne me toucheroient pas, si elles n’attiroient en même temps l’attention de M. Villars ; chacun de ses regards me parle du tendre intérêt qu’il prend à ma situation.

Dans un entretien que j’ai eu aujourd’hui avec lui sur mon voyage de Londres, il a fait mention de mylord Orville. J’en ai été tellement décontenancée, que j’ai cherché à détourner immédiatement