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INTRODUCTION À L’HISTOIRE


dra[1]. La maturité complète de leurs sens arrivera pour eux au bout de trois mois, cette année même. Il est facile de comprendre que l’homme qui est capable d’être converti par un Çravaka[2] puisse l’être par le Tathâgata, et que celui qui est capable d’être converti par le Tathâgata ne puisse l’être par un Çravaka.

« Ensuite Bhagavat fit cette réflexion : Pourquoi n’entrerais-je pas dans une méditation telle, qu’en y appliquant mon esprit, après m’être rendu maître des éléments de ma vie, je renonce à l’existence[3] ? Ensuite Baghavat entra dans une méditation telle, qu’en y appliquant son esprit, après s’être rendu maître des éléments de sa vie, il abandonna l’existence. À peine se fut-il rendu maître des éléments de sa vie, qu’un grand tremblement de terre se fit sentir ; des météores tombèrent [du ciel], l’horizon parut tout en feu. Les timbales des Dêvas retentirent dans l’air. À peine eut-il renoncé à l’existence, que six prodiges apparurent au milieu des Dêvas Kâmâvatcharas[4]. Les arbres à fleurs, les arbres de dia-

    dans la mythologie brâhmanique ; ils ont été adoptés et conservés dans l’ancien panthéon des Buddhistes.

  1. Subhadra est le dernier Religieux qui ait été ordonné par Çâkyamuni lui-même. Il en est souvent question dans les Suttas et dans les livres pâlis des Singhalais. (Tournour, Journ. As. Soc. of Beng., t. VII, p. 1007 et 1011. Mahâvamso, p. 11.) Je pense que c’est ce nom propre que les Chinois transcrivent ainsi : Su pa to lo. (Landresse, Foe koue ki, p. 385.) Hiuan thsang nous apprend qu’au viie siècle, il existait près de Kuçinagara un Stûpa qui portait son nom. Fa hian, deux siècles avant lui, nommait ce sage Siu po. (Foe koue ki, p. 235), et Klaproth affirme, d’après les livres chinois, que c’était un Brâhmane qui vécut jusqu’à cent vingt ans. (Ibid., p. 239.) Je soupçonne qu’il y a quelque inexactitude dans la traduction que M. A. Rémusat a donnée du passage de Fa hian relatif à ce Brâhmane, et qui est ainsi conçue : « Là où Siu po, longtemps après, obtint la loi. » Ce n’est pas longtemps après le Nirvâṇa de Çâkya que Subhadra se convertit au Buddhisme, mais du vivant même de Çâkya. J’oserai donc engager les personnes qui ont accès au texte chinois du Foe koue ki à vérifier si l’on ne pourrait pas traduire : « Là où Siu po, dans un âge avancé, obtint la loi. » Les livres sanscrits du Nord s’accordent avec les textes pâlis du Sud à nous représenter Subhadra comme très-vieux quand il reçut l’ordination de Çâkyamuni.
  2. Le mot Çrâvaka signifie auditeur ; j’y reviendrai dans la section de la Discipline.
  3. L’expression dont se sert ici le texte, Djîvitasam̃skârân adhichṭhâya, n’est pas claire ; je l’ai traduite conjecturalement. Le radical sthâ, précédé du adhi, a dans le sanscrit buddhique le sens de bénir : cela est surabondamment prouvé par les versions tibétaines. (Csoma, Asiat. Res., t. XX, p. 425 et pass.) Si tel était ici le sens de ce terme, il faudrait traduire : « Après avoir béni les éléments de ma vie, je renonce à l’existence. »
  4. J’ai vainement cherché, dans les livres sanscrits du Népâl qui sont à ma disposition, le sens de ce nom, qui désigne les Dieux de la région des désirs. Les Singhalais traduisent ce mot par « sensuel, livré aux désirs des sens, » et ils le dérivent, avec juste raison, de kâma, « désir, » et de avatchara, « qui va. » (Clough, Singhal. Diction., t. II, p. 828, col. 2, comp. à p. 51, col. 1.) L’orthographe Kâma watcharâ doit donc être abandonnée, parce qu’elle ne se prête à aucun sens. (Schmidt, Mém. de l’Acad. des sciences de S.-Pétersbourg, t. II, p. 24.) Voyez pour les nombreuses sous-divisions des étages célestes, les Mémoires de M. Schmidt (Mém. de l’Acad. des sciences de S.-Pétersbourg, t. I, p. 89 sqq. ; t. II, p. 21 sqq.) et de M. A. Rémusat (Essai sur la cosmog. buddh., dans Journal des Savants, année 1831, p. 597 sqq.)